Histoire et patrimoine

« ROGLIANO en haut du cap Corse est regardé aujourd’hui comme un simple village. Pourtant, l’ancien pagus aurelianus (le pays d’Aurélien, empereur romain) était la capitale de la Seigneurie de San Colombano. Le château qui domine Rogliano n’est pas un simple castellu : c’est « le » château seigneurial. Un seigneur génois y « régnait » : un Da Mare, propriétaire de la seigneurie à partir de 1246, c’est-à-dire des villages d’Ersa, Tomino, Centuri, Morsiglia, Meria, Pino, Barretali, Luri, Cagnano jusqu’aux frontières de l’autre seigneurie cap corsine : celle des Gentile qui régnaient à Brando, Erbalunga, Pietra-Corbara, Canari, Nonza.

Les Da Mare levaient des impôts sur leurs vassali, habitants de tous ces villages, sauf sur les franchi exemptés d’impôts (taille, corvées). Grâce à ces revenus, le seigneur entretenait le château, détruit par l’amiral génois Andrea Doria en 1554 ; puis la Tour de Barbara, dame-seigneur de San Colombano de 1554 à 1604. Le seigneur faisait des dons pour construire le couvent franciscain qui domine le village depuis 1520 et l’église conventuelle, l’un des deux lieux de sépulture de tous les villageois avec l’église Saint-Agnel (abbé napolitain).

Macinaggio et Centuri assuraient la vie économique du pays : pêche au corail, exportation des vins (notamment des muscats : excellents), importation du blé. D’où la richesse des cap corsins, leur haut niveau d’instruction dans les universités italiennes et leurs nombreuses constructions roglianaises : chapelles médiévales ; église Saints-Côme-et-Damien ; Palais américains (Nicrosi, Bastiani) ; tour Franceschi à Bettolacce ; oratoires (Saint-Roch, Sainte-Claire) ; Confrérie Santa Croce.

Le 2 décembre 1869, débarquée du yacht impérial l’Aigle, rentrant de l’inauguration du canal de Suez, S.M.I. l’Impératrice Eugénie, 43 ans, est montée à pied du quai de Macinaggio jusqu’à l’actuel Chemin de l’Impératrice et a offert en partant la somme nécessaire à la construction de la balustrade de marbre du chœur à l’église Saint-Agnel. »

Michel Vergé-Franceschi.
Professeur émérite des Universités.